8 mini efforts pour ne plus écrire comme un pied

Longtemps, Proust s’est couché de bonne heure et longtemps, moi, j’ai écrit comme un pied gauche. La forme, même pour un roman grand public de pur divertissement, ça compte. Si comme moi, vous n’êtes pas Honoré de Balzac (ce qui est probable puisque sinon vous seriez mort, et ce depuis 1850) et que vos premiers jets ressemblent plus à une dissertation d’élève de Terminale qu’au dernier Goncourt, pas de panique. Voici quelques ajustements qui rendront votre écriture plus claire et plus fluide, à défaut de faire de vous une réincarnation 2.0 de Proust ou Balzac.

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1. À mort les adverbes

Avant que qui que ce soit ne conteste, ce n’est pas moi qui l’ai dit, c’est Hemingway, prix Nobel de Littérature en 1954. Si vous n’êtes pas d’accord, voyez ça avec lui. Comme les adverbes sont souvent des mots longs avec des tas de double « m »  (anticonstitutionnellement est un adverbe), on pense qu’en mettre beaucoup et partout donne l’air intelligent. En fait, ça donne surtout l’air pédant. Donc, on utilise des adverbes, uniquement quand c’est indispensable. Et si vous vous posez la question à chaque fois que vous en utilisez un, vous allez voir que vous allez pouvoir en supprimer un paquet.

La plupart du temps, ils sont utilisés pour renforcer un verbe mal choisi ou trop vague, donc compenser une faiblesse de style :

Par ex : marcher lentement, c’est flâner, déambuler ;

parler fort, c’est crier, hurler, vociférer ;

regarder attentivement c’est examiner, dévisager etc.

À chaque fois  que vous pouvez supprimer un adverbe et le remplacer par un verbe plus fort ou même une expression plus originale, faites-le. Ce qui nous amène d’ailleurs au point suivant :

2. Utilisez des verbes forts

Le verbe représente l’action, c’est en général le mot le plus important de chaque phrase avec le sujet. Alors sauf si on recherche un style très « parlé », on évite les auxiliaires être et avoir, les « il y a », les « c’est », les « faire » et les « aller » et on choisit toujours le meilleur verbe, le plus précis, le plus concret, avec soin.

Par ex : on ne fait pas à manger, on cuisine ;

on ne fait pas une drôle de tête, on affiche une drôle de tête 

il n’y a pas des tulipes dans le jardin, les tulipes poussent/fleurissent dans le jardin

Emilie n’est pas généreuse, elle fait preuve de générosité

ce n’est pas une raison, ça constitue une raison etc. 

3. Évitez de conjuguer les verbes à la forme passive

Pour la simple et bonne raison que vous utilisez plus de mots pour dire la même chose de manière moins directe. 

Par ex : « les biscuits ont été mangés par le Grand Vizir » « le grand vizir a mangé les biscuits » (cet exemple n’a aucun sens, il est temps que j’aille me coucher)

Exception si c’est volontaire, pour mettre en avant la passivité de votre sujet et son incapacité à réagir.

Par ex : « elle s’est fait agresser » fonctionne mieux que « quelqu’un l’a agressée ». 

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4. Ne multipliez pas les  adjectifs

Je ne sais pas pourquoi, certaines personnes pensent que les adjectifs vont par trois. Là encore, mieux vaut prendre le temps de trouver le bon adjectif ou le bon mot, celui qui déclenchera tout de suite le sentiment que vous recherchez chez le lecteur, plutôt que d’en rajouter trois tonnes.

ex : « Ses habits étaient sales, déchirés et usés », quatre mots que vous pouvez résumer en un seul « haillons ». 

5. Faites des phrases courtes

Si vous utilisez deux fois plus de mots que nécessaire pour dire quelque chose, vous diluez l’information principale et donc l’intensité de votre récit. Préférez les points aux virgules, évitez d’avoir plusieurs propositions subordonnées dans la même phrase (vous savez, ces morceaux de phrases qui commencent par « que ou qui, où et quand » et qui décrivent le mot qui les précède) Il faut énormément de talent pour écrire des phrases longues qui ne soient pas bancales ou incompréhensibles. Ceci dit, si vous appliquez les cinq premiers points, vous devriez déjà avoir raccourci vos phrases.

6. Il dit, elle dit et éventuellement on répond

Il existe un cas où chercher désespérément à utiliser des verbes forts est contre-productif : dans les dialogues.

J’ai lu quelque part, malheureusement je ne sais plus où, une remarque que j’ai trouvée très pertinente. Un lecteur lambda qui lit un roman ne déchiffre pas tous les mots. Il reconnait un certain nombre de mots familiers au premier coup d’oeil. Parmi eux, les allocutions « dit-il » ou « dit-elle », qui lui sont tellement familiers, qu’il ne les lit pas, mais les reconnaît instantanément. Ces allocutions passent donc inaperçues et ne viennent pas polluer le coeur de ce que vous êtes en train d’écrire, à savoir le contenu du dialogue. 

Le plus simple dans un dialogue, c’est donc d’utiliser « dit-il », « dit-elle » et éventuellement le verbe « répondre », voire rien du tout, si vous glissez une petite action de temps en temps qui permet au lecteur de savoir quel personnage va parler. Si l’action et les dialogues sont sensés, il devrait pouvoir comprendre qui parle, sans que vous ayez besoin d’assommer tout le monde avec ce genre de passage naze :

Ex: 

« — C’est quoi ça ? éructa-til. 

— J’en sais rien, se défendit-elle

— C’est impossible, s’emporta-t-il, je l’ai trouvé dans ton sac à main! »

— C’est la première fois que je le vois, s’indigna-t-elle »

 

7. Évitez les répétitions

Simplement parce qu’elles ne sont pas très jolies et donnent l’impression que vous n’avez pas de vocabulaire (encore une fois, ne vaut pas pour les « dit-il », « dit-elle »). Rien de très compliqué, l’outil magique c’est ce dictionnaire des synonymes

8. Corrigez vos fautes d’orthographe

C’est la base de la base, d’un autre côté, quand on écrit des romans de 300 pages, c’est normal de finir avec les yeux qui saignent à la 45e relecture et de laisser passer quelques fautes aussi énormes que vous. Là aussi, un outil qui rend bien service : le correcteur en ligne bonpatron.com.

Voilà, j’ai menti dans le titre de cet article, parce que ce ne sont pas des mini-efforts, mais des maxi-efforts qu’il faut faire pour écrire clairement, surtout quand on doit les appliquer sur un roman en trois tomes de 400 pages chacun, dont on a mis cinq ans à écrire l’intrigue. Mais  écrire, c’est surtout réécrire et si vous avez une bonne intrigue et des personnages intéressants, ce serait dommage que la forme ne soit pas à la hauteur du fond… Alors, au travail et bon courage…

Si vous avez d’autres conseils pour avoir une écriture plus fluide, n’hésitez pas à commenter !

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8 réflexions sur “8 mini efforts pour ne plus écrire comme un pied

  1. Bonjour,

    Un grand merci pour tous vos conseils.. Ils ont aussi précieux qu’encourageants. J’ai 41 ans, un mari, 2 enfants en bas âge, un travail…. Bref, c’est votre article sur comment trouver du temps pour écrire qui m’a offert le déclic tant attendu… Je me suis aménagée mon bureau dans la mezzanine ( desservie par une échelle inaccessible aux enfants!!!) et je me suis lancée dans l’écriture de mon 1er roman.. Après 30 ans de poèmes, prose et autres journaux intimes, je me suis dis qu’il était inutile d’attendre plus longtemps. Et c’est en grande partie à vous que je le dois. Alors : merci, merci, merci ( vous êtes sûre que vous n’aimez pas les répétitions ???)…
    J’ai bien sur adoré vos 2 romans que je trouve droles, émouvants avec une tonalité juste. J’attends avec impatience un 3eme opus….
    Si j’osais, je vous demanderai un article sur les dialogues. C’est une de mes difficultés, j’ai du mal à les introduire dans mon texte, ça me parait toujours maladroit et ça manque de fluidité…
    Dans tous les cas, encore merci…

    • Bonjour Alexandra, merci pour cet adorable message qui me fait commencer la semaine le sourire aux lèvres (et me ferait presque aimer les répétitions ;-).
      Je note sur ma to-do list de préparer un article sur les dialogues dans pas trop longtemps !
      Je vous souhaite bonne continuation et beaucoup de succès dans votre projet d’écriture, dans tous les cas, bravo de vous être lancée.

  2. Pingback: Réussir les dialogues de son roman | Marie Vareille

  3. Bonjour Marie,
    J’apprécie tes conseils et je vais m’efforcer de les mettre en place dès à présente.
    Ce sera une route longue mais pour mes chroniques, c’est un entrainement.

  4. Bonsoir,

    je suis tombé sur votre article grâce à Twitter, et il m’a tiré le sourire plusieurs fois (ce qui est bon signe, je vous rassure).
    Je trouve cet article très sensé, surtout, et comme vous le dites, c’est que ce sont des maxis efforts! Mais pour un résultat à la hauteur de nos attentes.
    Juste une précision concernant la longueur des phrases: j’en joue pour imprimer le rythme désiré à telle ou telle action.
    Merci enfin pour ces petits rappels!

  5. Merci pour ces conseils plein d’humour ! Je me rends compte que j’ai beaucoup d’efforts à faire à propos des adverbes et des adjectifs ! J’avoue que, parfois, j’en abuse…
    Très bon article, je vais le partager 😉

    • Merci beaucoup 🙂 Ecrire est comme tous les métiers, on commence débutant et ce n’est qu’en écrivant le plus possible qu’on peut progresser et apprendre !

  6. Merci pour tous ces précieux conseils. J’ai encore un peu de mal avec les verbes forts. Je vais m’imprimer votre liste et vérifier à chaque relecture que j’applique bien vos conseils

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